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puis l’ouverture de l’instruction jusqu’au prononcé du jugement, et bien que la justice, faute de preuves suffisantes, et aussi pour ne point disséminer ses efforts, n’eût pas voulu impliquer Lupin dans l’affaire, tout le procès fut dirigé contre Lupin. C’était lui l’adversaire que l’on voulait atteindre ; lui, le chef qu’il fallait punir en la personne de ses amis ; lui, le bandit célèbre et sympathique, dont on devait détruire le prestige aux yeux de la foule. Gilbert et Vaucheray exécutés, l’auréole de Lupin s’évanouissait. La légende prenait fin.

Lupin… Lupin… Arsène Lupin… on n’entendit que ce nom durant les quatre jours. L’avocat général, le président, les jurés, les avocats, les témoins, n’avaient pas d’autres mots à la bouche. À tout instant on invoquait Lupin pour le maudire, pour le bafouer, pour l’outrager, pour le rendre responsable de toutes les fautes commises. On eût dit que Gilbert et Vaucheray ne figuraient que comme comparses, et qu’on faisait son procès à lui, le sieur Lupin, Lupin cambrioleur, chef de bande, faussaire, incendiaire, récidiviste, ancien forçat ! Lupin assassin, Lupin souillé par le sang de sa victime, Lupin qui restait lâchement dans l’ombre après avoir poussé ses amis jusqu’au pied de l’échafaud !

— Ah ! ils savent bien ce qu’ils font ! murmura-t-il. C’est ma dette que va payer mon pauvre grand gamin de Gilbert. C’est moi le vrai coupable.

Et le drame se déroula, effrayant.

À sept heures du soir, après une longue délibération, les jurés revinrent en séance, et le président du jury donna lecture des réponses aux questions posées par la Cour. C’était « oui » sur tous les points. C’était la culpabilité et le rejet des circonstances atténuantes.

On fit rentrer les deux accusés.