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semblait indifférent et gardait un air étrange dont Raoul devait se souvenir par la suite.

— Un mot encore, fit Raoul, en s’arrêtant sur le seuil. Je prends l’engagement devant Marescal et devant votre beau-père de vous conduire dans une retraite paisible où, durant un mois, vous ne me verrez jamais. Dans un mois j’irai vous demander comment vous entendez diriger votre vie. Nous sommes bien d’accord ?

— Oui, dit-elle.

— Alors, partons.

Ils s’en allèrent. Dans l’escalier, il dut la soutenir.

— Mon automobile est près d’ici, dit-il. Aurez-vous la force de voyager toute la nuit ?

— Oui, affirma-t-elle. C’est une telle joie pour moi d’être libre !… et une telle angoisse ! ajouta-t-elle à voix basse.

Au moment où ils sortaient, Raoul tressaillit. Une détonation avait retenti à l’étage supérieur. Il dit à Aurélie, qui n’avait pas entendu :

— L’auto est à droite… Tenez, on la voit d’ici… Il y a une dame à l’intérieur, celle dont je vous ai déjà parlé. C’est ma vieille nourrice, Allez vers elle, voulez-vous ? Pour moi, je dois remonter là-haut. Quelques mots, et je vous rejoins.

Il remonta précipitamment, tandis qu’elle s’éloignait.

Dans la pièce, Brégeac, renversé sur un canapé, le revolver en main, agonisait, soigné par son domestique et par le commissaire. Un flot de sang jaillit de sa bouche. Une dernière convulsion. Il ne remua plus.