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IX

Sœur Anne, ne vois-tu rien venir ?


Vers deux heures, ce même jour, « la petite », comme disait Marescal, s’habillait. Un vieux domestique, du nom de Valentin, qui composait maintenant tout le personnel de la maison, lui avait servi à manger dans sa chambre, et l’avait prévenue que Brégeac désirait lui parler.

Elle relevait à peine de maladie. Pâle, très faible, elle se contraignait à demeurer droite et la tête haute pour paraître devant l’homme qu’elle détestait. Elle mit du rouge à ses lèvres, du rouge à ses joues, et descendit.

Brégeac l’attendait au premier étage, dans son cabinet de travail, une grande pièce aux volets clos, et qu’une ampoule éclairait.

— Assieds-toi, dit-il.

— Non.

— Assieds-toi. Tu es fatiguée.

— Dites-moi tout de suite ce que vous avez à me dire, afin que je remonte chez moi.

Brégeac marcha quelques instants dans la pièce. Il montrait un visage agité et soucieux. Furtivement, il observait Aurélie, avec autant d’hostilité que de passion, comme un homme qui se heurte à une volonté indomptable. Il avait pitié d’elle aussi.

Il s’approcha, et lui mettant la main sur l’épaule, la fit asseoir de force.

— Tu as raison, dit-il, ce ne sera pas long. Ce que j’ai à te communiquer peut être dit en quelques mots. Tu décideras ensuite.