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nait pas. Marescal ne pensait qu’à Brégeac et ne se retourna pas davantage, de sorte que Raoul ne prenait aucune précaution. À quoi bon ?

En dix minutes, le premier des trois coureurs atteignit la porte des Ternes. Brégeac avait tellement chaud qu’il ôta son pardessus. Près de l’octroi, un tramway s’arrêtait, et de nombreux voyageurs attendaient à la station pour monter et rentrer dans Paris.

Brégeac se mêla à cette foule.

Marescal aussi.

Le receveur appela les numéros. Mais la bousculade fut si forte que Marescal n’eut aucune peine à tirer la bouteille de la poche de Brégeac, et que celui-ci ne s’aperçut de rien. Marescal aussitôt franchit l’octroi et reprit ses jambes à son cou.

— Et de deux, ricana Raoul, mes bonshommes s’éliminent entre eux, et chacun travaille pour moi.

Lorsque, à son tour, Raoul passa l’octroi, il vit Brégeac qui faisait des efforts désespérés pour sortir du tramway, malgré la foule, et pour se mettre à la poursuite de son voleur.

Celui-ci choisissait les rues parallèles à l’avenue des Ternes, lesquelles sont plus étroites et plus tortueuses. Il courait comme un fou. Quand il fit halte sur l’avenue de Wagram, il était à bout de souffle. Le visage en sueur, les yeux injectés de sang, les veines gonflées, il s’épongea un instant. Il n’en pouvait plus.

Il acheta un journal et enveloppa la bouteille, après y avoir jeté un coup d’œil. Puis il la plaça sous son bras et repartit d’un pas chancelant,