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LA LETTRE ANONYME

mène et qui jouit de l’air frais. Elle portait une ombrelle fermée, un réticule pendait à son bras, un grand chapeau de paille noire enveloppait l’auréole de ses cheveux blonds.

À vingt mètres de lui, elle s’arrêta et regarda de tous côtés. Elle ne vit personne et continua son chemin.

Hervé observa l’expression de son visage, une expression inquiète, provocante, qu’il ne lui connaissait pas. Et, tout à coup, il s’aperçut qu’il tenait de sa main crispée, au fond de sa poche, un revolver.

Il eut peur de lui, se domina ; puis, comme elle approchait, il perdit la tête et, d’un bond, se rua sur elle.

« Toi ! toi ici ! proférait-il… Pas un mot… Je te défends de parler. »

Il la bousculait et criait, au risque d’être entendu. De fait, une troupe d’enfants accourut vers eux. Alors il empoigna le bras de Marceline, et il la poussa à travers les fourrés, trébuchant comme elle aux racines des arbres.

« Tais-toi… pas un mot… grinçait-il, hors de lui… Tu ne peux pas nier. J’ai la preuve… la preuve certaine, puisque tu es ici… »

Ils arrivèrent à la route du Lac. Une auto passa, vide. D’un effort, il y jeta Marceline, donna l’adresse au chauffeur et monta.

« Eh bien, parle ! Réponds ! tu restes là comme une coupable… Défends-toi… »

Elle ne bougeait pas, en effet, et sa jolie figure, calme, impénétrable, n’offrait pas le moindre signe de frayeur, ni même d’embarras.