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L’ÉCOLE DU MENSONGE

Et en somme, réduit à ces ruses, le mal eût été fort bénin. Mais Diane, amenée à travestir sa pensée, ne devait-elle point l’être à dénaturer certains actes de sa conduite ?

Un jour, ayant rencontré Clotilde, avec qui définitivement son mari l’avait priée de rompre, elle accepta une promenade au Bois, puis une tasse de thé au Pavillon japonais. Escapade anodine et qui n’émut pas sa conscience ; cependant le soir, quand elle s’assit en face de son cahier, ce fut pour ainsi dire sa plume elle-même qui refusa de noter une telle infraction aux ordres du maître. Non, ce n’était pas possible. Diane parla du Bois, de la tasse de thé, mais de Clotilde, point,

Et, n’ayant pas parlé de Clotilde sur son journal, elle dut répondre le lendemain à Ludovic qui l’interrogeait au sujet de son amie :

« Clotilde ? je ne l’ai pas revue. »

Plusieurs jours après, elle alla chez elle. Leur amitié se fortifia. Clotilde, qui avait beaucoup d’influence sur Diane, la décida à venir également à son jour de réception. Diane y connut des dames dont les époux voyagaient, et des messieurs qui la trouvèrent charmante et le lui dirent. Indignée de leurs propos, elle les rudoya. Elle aimait tant son Ludovic ! Elle l’aimait surtout beaucoup trop pour consigner dans son livre un tas d’histoires insignifiantes qui n’eussent point manqué de le peiner : les hommes sont si étranges !

Ainsi donc, logiquement, par une pente insensible et naturelle, cette très honnête femme, amoureuse de