Page:Leblanc - La Robe d’écailles roses, 1935.djvu/67

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
63
L’ÉCOLE DU MENSONGE

et il le savait, non pas seulement par l’idée qu’il avait pu prendre de sa femme, mais par le témoignage irrécusable d’une âme qui se révélait à elle-même ses petites défaillances et ses distractions ingénues.

De ce jour elle fut plus douce encore et plus tendre avec lui. Quand leurs yeux se mêlaient, il lui semblait que le regard de Ludovic la pénétrait jusqu’au fond de son être et considérait des spectacles qu’elle ignorait elle-même, mais qui le ravissaient, lui, tout un royaume où il rencontrait partout son image souveraine.

Peut-être écrivait-elle moins souvent, mais chaque fois c’était avec une sorte d’ivresse : « Regarde-moi, Ludovic, voilà comment mon âme est faite. » État délicieux de limpidité, de transparence, de fluidité !

Dans les ménages les plus unis, il y a des instants de désaccord où les meilleurs se portent des coups douloureux. Quel remède pour les blessures secrètes qu’une confession immédiate, écrite par l’un, lue aussitôt par l’autre ! Diane atténuait l’incident, n’éprouvait pas d’amour-propre à se donner plus de torts qu’elle ne croyait en avoir, et Ludovic, attendri, demandait pardon des siens.

Elle en arriva par là même, conséquence inévitable, à certaines altérations de la vérité, soit en s’accusant trop sévèrement, soit au contraire — on n’est pas parfait — en passant sous silence telle petite chose qui lui eût été par trop défavorable.

Avant tout, n’est-ce pas ? il fallait plaire à Ludovic