Page:Leblanc - La Robe d’écailles roses, 1935.djvu/17

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
13
LA ROBE D’ÉCAILLES ROSES

Elle se leva, s’assit devant sa coiffeuse, sembla hésiter. Qu’allait-elle faire ? Qu’allait-elle dire ?

Elle ôta ses bagues, elle ôta son rang de perles, et se tourna vers lui comme si elle eût été sur le point de parler. Mais elle ne parla pas.

Ils se regardèrent un instant, Puis soudain elle se leva de nouveau, ouvrit le coffret où elle mettait son argent, saisit les deux billets que Jean avait déposés et, s’approchant de lui :

« Tenez, dit-elle brusquement, vous pouvez les reprendre. »

Il tressaillit sous l’insulte et murmura :

« Qu’est-ce que signifie ?… Je n’admets pas… »

Elle s’irrita tout de suite :

« Gardez-les, je vous dis… Je saurai bien m’en passer… Je paierai tant par mois, sur l’argent du ménage… Raquin acceptera… et au moins…

— Et au moins ? demanda-t-il.

— Au moins, vous ne pourrez pas me reprocher…

— Je ne vous reproche rien…

— Mais si… mais si… vous avez souvent des airs d’homme excédé par le travail, ruiné par sa femme… »

Il s’était levé à son tour et l’observait, cherchant à deviner au fond de ses yeux sa pensée secrète.

« Je ne vous ai jamais dit que j’étais excédé par le travail.

— Non, évidemment, mais je le vois bien, moi ! Est-ce que vous croyez que je ne le vois pas ?… et que tout cet argent, c’est pour moi que vous le gagnez… pour moi… parce que vous m’aimez… parce que tu m’aimes… et que tu ne sais rien me refuser… et que tu es