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LE ROMAN D’UNE JEUNE FILLE

Un éclair passa dans les yeux de Mme de la Vaudraye, mais elle se domina. La même volonté inflexible crispa son visage d’un masque de raideur et de dureté. Elle dit, d’un ton froid :

« Je regrette infiniment que tous ces beaux projets ne puissent se réaliser, mais il n’y a pas de ma faute… faites des recherches… qui sait ! peut-être arriverez-vous à découvrir la vérité indispensable. »

Désespérée, Gilberte fut près de se jeter à son cou et de lui dire : « Restez, je vous en supplie… soyez pour moi la mère que j’ai perdue… je vous chérirai comme une fille… »

Mais Guillaume la prévint :

« À quoi bon s’humilier, Gilberte ?.… Si ma mère ne consent pas…

— Eh bien…

— Eh bien, ne sommes-nous pas libres ?

— Non, Guillaume, répondit-elle fermement, je ne vous épouserai qu’avec l’entier aveu de votre mère. »

Il pâlit et murmura :

« Mais… nous nous verrons…

— Nous ne nous verrons pas, nous ne pourrions nous voir que furtivement, c’est indigne de nous.

— Si je vous rencontre…

— Je ne sortirai pas d’ici.

— Cependant…

— Nous attendrons, Guillaume, ne suis-je pas votre fiancée ? »

Il s’inclina. Sa mère sortait. Il la suivit.

Il sembla à Gilberte que jamais elle n’avait été aussi seule dans la vie.