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LE ROMAN D’UNE JEUNE FILLE

milieu de leurs conversations les plus saugrenues, un mot de vous met de l’ordre, de la clarté, de la simplicité. »

Ce n’était plus la même voix. Si rude et si cassante d’ordinaire, elle s’était faite humble et grave. Et son visage habituellement sévère avait une expression de douceur infinie. On ne sentait plus en lui d’acrimonie, ni de gêne, ni de méfiance, mais l’abandon d’une nature qui se détendait et une mélancolie apaisée.

Lequel était le vrai Guillaume de ces deux hommes si différents ? Gilberte ne se le demanda même point, trop heureuse de croire immédiatement à la plus sympathique des deux images qui lui étaient offertes.

Elle sourit donc à cet autre Guillaume et lui dit :

« Alors… ces messieurs ?

— Vos deux protégés reprendront la place qu’ils occupent si bien. Je requiers cependant une exclusion temporaire comme châtiment, car c’en est un pour le Hourteulx et Beaufrelant. Après, s’ils sont bien sages…

— Et vous serez aimable avec eux ?

— Avec eux, et avec les autres, autant du moins que je le pourrai.

— C’est donc bien difficile ?

— Extrêmement ! que voulez-vous, les imbéciles me rendent nerveux et injuste. Je n’ai pas votre charité, moi.

— Il suffit d’un peu d’indulgence, songez à votre mère.

— Oh ! ma mère ! ma mère ! »

Cette exclamation eut quelque chose de douloureux et d’âpre qui frappa Gilberte. Par délicatesse, elle