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LE ROMAN D’UNE JEUNE FILLE

peur indéfinissable l’envahit. Et cette peur s’accrut de chaque seconde qui s’écoulait. Le silence lui semblait anormal et terrible. Les ténèbres étaient lourdes de menaces, et elle n’en pouvait détacher son regard, fascinée par tout ce qu’elle y pressentait de péril inconnu.

Un souvenir redoubla son appréhension. La veille, chez Mme de la Vaudraye, le hasard de la conversation l’avait amenée à dire que ses domestiques devaient aller à cette fête du faubourg. On la savait donc seule au Logis.

Fermer la fenêtre, rabattre les volets et mettre un obstacle entre elle et les embûches qui se préparaient au fond de la nuit méchante, elle n’eut plus que cette idée, et cependant elle n’osait remuer, comme si le moindre mouvement l’eût exposée à des dangers immédiats… Mais quels dangers ?

Elle fit un effort et se leva. Au même moment, une tête apparut, quelqu’un enjamba le balcon et sauta dans la pièce. C’était Simare.

La détente de ses nerfs fit qu’elle eut presque envie de rire. Brisée de fatigue, elle s’assit et murmura :

« Oh ! monsieur, ce n’est pas bien… je n’aurais pas cru… »

Il se précipita à ses genoux.

« Ne me condamnez pas… je ne sais plus ce que je fais… je suis obligé de partir pour un mois… alors, j’ai voulu vous voir… vous dire ce que j’éprouve, ce que je souffre… Ah ! vous ne savez pas combien votre indifférence m’a torturé… ma tristesse, mon admiration, mon espoir, mon émotion, près de vous, vous n’avez