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LE ROMAN D’UNE JEUNE FILLE

Il dit : « Je ne sais si je puis parler, il y a des oreilles chastes. »

Un geste des mères, un coup d’œil, et les cinq demoiselles disparurent sans en avoir l’air.

Il insista :

« Tout de même, je tiens à vous avertir que c’est très risqué, il y aura de gros mots, des mots crus, la couleur locale l’exige.

— Eh ! qu’importe, M. Simare, s’écria-t-on, ne sommes-nous pas entre hommes ? »

Gilberte était là, au premier rang, ne comprenant rien au départ des jeunes filles, ni à tout ce préambule, et absolument ignorante de ce qui la menaçait.

M. Simare s’approcha, la salua galamment, comme un toréador qui dédie à la personne la plus marquante la course où il va s’élancer, et s’assit en face d’elle, à deux pas.

« Le cadre d’abord, madame : l’orée d’un bois — les personnages : Fanchon et son ami Colin qui lui conte fleurette… d’assez près, et qui… mais attendons… Puis, non loin, au milieu du bois, M. le curé qui se promène en lisant son bréviaire et que sa promenade dirige du côté de nos jeunes campagnards… il vient… il avance. Vous voyez ça d’ici, madame ?

— Oui, oui, dit Gilberte vivement, comme une enfant qui s’intéresse à un conte de fée. Et alors ?

— Le soleil dardait ses feux à travers les branches, des coins de ciel bleu… »

Il continua longtemps sa description, il parla de M. le curé, et des oiseaux, et des fleurs, et de l’ombre