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LE ROMAN D’UNE JEUNE FILLE

Et le dimanche matin, quand la messe sonna, elle sortit pour la première fois du Logis.

Il lui sembla qu’elle s’éveillait d’un rêve de paix et de silence, tellement l’animation de la rue principale lui fut pénible. Du monde aux fenêtres, du monde au seuil des boutiques, du monde sous le porche de l’église, et, tout ce monde-là l’observait, la dévisageait, chuchotait à son passage.

L’église lui fut un refuge, malgré la foule qui l’emplissait et malgré l’agitation dont sa présence fut le signal. On fut stupéfait de sa jeunesse, ébloui de sa beauté. Lorsqu’elle redescendit la nef, un murmure d’admiration frissonna parmi les rangs des fidèles. Mais, près du bénitier, un incident la retarda quelques secondes. Trois hommes s’étaient précipités. D’un même geste, les trois mains plongèrent au bénitier de marbre et se tendirent vers Gilberte. Elle baissa son voile et passa.

Dehors, la foule l’attendait. Gilberte hâta le pas, reprise de timidité au grand jour.

Elle ne pensait qu’à rentrer au Logis, dans l’ombre. Mais au bout de la rue principale, il y avait un pâtissier, et elle en aperçut l’étalage, riche à profusion de crèmes appétissantes et de gâteaux multicolores, et comme elle n’était nullement préparée contre une telle tentation, elle y succomba.

Lentement, avec des hésitations, elle choisit. La marchande fit un paquet, Gilberte le prit et s’en alla. Mais à la porte elle s’arrêta, craintive. Un groupe de gamins stationnait.

Ils étaient là, les mains dans leurs poches, en ba-