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LE ROMAN D’UNE JEUNE FILLE

— Les méchantes langues ?

— Mais oui, mais oui, vous comprenez bien qu’on ne vit pas comme vous vivez sans éveiller la curiosité d’une petite ville. On se demande, et non sans quelque droit, avouez-le, les raisons de votre emprisonnement. D’autant plus, m’a-t-on répété, que votre bonne, Adèle, se renferme dans un mutisme qui indispose l’opinion publique. Enfin, on dit…

— On dit…

— Eh bien, on dit que vous cachez ainsi votre existence, parce que…

— Parce que ?… »

Mme de la Vaudraye hésita, ou plutôt parut hésiter, puis, se décidant :

« Parce que vous ne vivez pas seule. »

Elle se leva, croyant Gilberte écrasée sous cette accusation. Mais Gilberte, qui cherchait ingénument ce qu’elle avait voulu dire, murmura :

« Pas seule ? évidemment, puisqu’Adèle est là, et son mari, et son fils.

— Allons, ne vous alarmez point, mon enfant, conclut Mme de la Vaudraye, d’un petit ton protecteur. Ce ne sont là que potins et racontars que je saurai réduire à néant si vous m’y aidez. Il suffirait d’une concession. Ainsi, dimanche, je quête à la grand’messe, promettez-moi de vous y montrer. C’est promis, n’est-ce pas ? » dit-elle en s’en allant.

Gilberte eût préféré de beaucoup se tenir tranquillement chez elle.

« Il paraît, se dit-elle, que cela fait de la peine à des gens. »