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LA ROBE D’ÉCAILLES ROSES

— Merci ! je l’ai mise au moins sept fois ! Tout le monde me la connaît. Je suis ridicule avec. Tenez, j’aimerais mieux… »

Elle s’interrompit, et gravement :

« Savez-vous qui doit venir au bal des Créhange ?

— Ma foi…

— La princesse Dougloff elle-même, une des femmes les plus élégantes de Paris, dont on cite les toilettes, et qui lance la mode de demain.

— Eh bien ?

— Eh bien, j’ai ma réputation à soutenir, et je ne veux pas que l’on fasse des comparaisons à mon désavantage. Ma robe d’écailles roses n’est pas de la première fraîcheur, elle est démodée, je ne la mettrai pas. À moins toutefois…

— À moins toutefois, reprit Jean, plein d’espoir.

— À moins que vous n’en soyez à deux mille francs près, mon cher ami, auquel cas. »

Darzas tressaillit à l’énoncé de ce chiffre.

« Ah ! c’est deux mille francs que vous prévoyez…

— Oui, un prix de faveur que me fait Raquin… une vraie chance. Il m’a montré le modèle… Figurez-vous, mon cher ami, une tunique toute brodée, mais des broderies magnifiques… une profusion de perles baroques… »

Sans l’écouter, il la regardait, et comme toujours cette mignonne créature qui était sa joie et son orgueil l’émouvait avec ses yeux vifs, Sa petite bouche un peu dédaigneuse et l’expression charmante, futile et réfléchie de son visage. Il l’aimait jusque dans ses caprices d’enfant gâtée. Il l’aimait comme elle était,