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— Bravo ! s’écria le marquis avec bonne humeur. Et, bien entendu, une petite commission, hein ?

— Aucune.

— Vous travaillez gratuitement ?

— Pour mon plaisir.

Raoul lança ces derniers mots en riant aussi. Comme il était loin des projets qu’il avait exposés à Courville ! Les vingt ou trente millions pour lui… dix pour cent abandonnés au marquis… En vérité, son besoin de se faire valoir et de jouer un beau rôle en face de son interlocuteur, et surtout devant la jeune fille, l’eût conduit à offrir de l’argent plutôt qu’à en réclamer.

Il allait de long en large, la tête droite, heureux d’avoir barre sur d’Erlemont et de se montrer sous un jour avantageux.

Désorienté, dominé par lui, le marquis prononça sans plus d’ironie :

— Vous avez un renseignement à m’apporter ?

— Au contraire, je viens vous en demander, dit Raoul gaiement. Mon but est simple je vous offre ma collaboration. Voyez-vous, monsieur, dans toutes les entreprises auxquelles je me consacre, il y a toujours une période de tâtonnement qui serait beaucoup plus courte si on voulait bien se confier à moi du premier coup, ce qui est rare. Je me heurte naturellement à des réticences et à des cachotteries qui m’obligent à tout découvrir par moi-même. Aussi que de temps perdu ! Comme vous agiriez dans votre intérêt si vous consentiez à m’épargner les fausses pistes et à me dire, par exemple, en quoi consistait ce mystérieux héritage, et si vous avez porté plainte !

— C’est tout ce que vous désirez savoir ?

— Fichtre non ! s’écria Raoul.

— Quoi encore ?

— Puis-je parler devant mademoiselle du drame qui s’est déroulé dans ce château à l’époque où vous n’étiez pas encore propriétaire de Volnic ?

Le marquis tressaillit, et répondit sourdement :

— Certes. J’ai parlé moi-même à