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XX

Sœur Adélaïde.

— Oui, cela vaut mieux, répéta Stéphane quinze jours plus tard, lorsqu’il eut raconté à son ami, le docteur Gassier, le tragique dénouement de l’aventure si merveilleusement commencée. Et je dis que cela vaut mieux parce que je suis persuadé que Flavie aura subi les mêmes impressions que moi. Séparés violemment et définitivement par le coup de revolver de Véronique, nous aurions trop souffert dans notre amour brisé. Sachant ce qui est, nous souffrons moins, nous n’avons même pas le droit de souffrir d’une séparation qui est dans l’ordre même des choses. L’oubli nous est plus facile que si nous étions torturés par le désir de nous revoir.

Le docteur, qui avait écouté avec attention, hocha la tête.

— Tu as raison… tout est bien ainsi.

Et il ajouta, légèrement ironique :

— Heureusement même que vous n’avez connu la gravité de votre faute qu’après l’avoir commise.

Stéphane le regarda. Se moquait-il de lui ? Le docteur lui dit en souriant :

— Non, je ne plaisante pas. Mais que veux-tu, mon petit ? Le vieux sceptique que je suis n’attache pas autant d’importance que toi à ce qui s’est passé. Vous n’êtes responsable de rien. L’acte commis, en l’occurrence, n’est infâme que s’il est volontaire. Mais, là, ce sont les circonstances, aidées par Zoris et par Irène qui ont agi. Alors, pourquoi dramatiser ?… Il n’y a qu’un seul dénouement qui soit tragique, c’est la mort. Flavie n’est pas morte. Véronique non plus, et toi non plus. Reste l’avenir. Qu’as-tu décidé ?

— Séphora et moi nous avons vu le notaire de Zoris, à Marseille. Je rachète les hypothèques, ainsi que deux ou trois diamants que Séphora a pu garder, ce qui permettra aux sœurs d’Esmiane de vivre tranquilles un an ou deux ; d’ici là, Séphora espère convaincre Flavie d’accepter le legs de Guillaume Bréhange.

— Et toi, que vas-tu devenir ?

— J’ai des projets de voyage en Algérie et au Maroc. Je pense beaucoup à une étude sur les antiquités romaines dans l’Afrique du Nord.