Page:Leblanc - L’Aiguille creuse, 1912.djvu/340

Cette page a été validée par deux contributeurs.
326
L’AIGUILLE CREUSE

— Alors tu te demandes si ton devoir n’est pas de rester côté Ganimard, justice, société, morale, au lieu d’aller côté Lupin, honte, infamie, déshonneur ?

— Précisément.

— Par malheur, mon petit, tu n’as pas le choix… Pour l’instant, il faut qu’on nous croie morts tous les deux… et qu’on me fiche la paix que l’on doit à un futur honnête homme. Plus tard, quand je t’aurai rendu ta liberté, tu parleras à ta guise… je n’aurai plus rien à craindre.

À la manière dont Lupin lui étreignit le bras, Beautrelet sentit que toute résistance était inutile. Et puis, pourquoi résister ? N’avait-il pas le droit de s’abandonner à la sympathie irrésistible que, malgré tout, cet homme lui inspirait.

Ce sentiment fut si net en lui qu’il eut envie de dire à Lupin :

— Écoutez, vous courez un autre danger plus grave : Herlock Sholmès est sur vos traces…

— Allons, viens, lui dit Lupin, avant qu’il se fût résolu à parler.

Il obéit et se laissa mener jusqu’au bateau, dont la forme lui parut singulière et l’aspect tout à fait imprévu.