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L’AIGUILLE CREUSE
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inoffensive, je me contins et m’approchai de lui.

C’était un homme jeune, au visage énergique, aux longs cheveux blonds, et dont la barbe, un peu fauve de nuance, se divisait en deux pointes courtes. Son costume rappelait le costume sobre d’un prêtre anglais, et toute sa personne, d’ailleurs, avait quelque chose d’austère et de grave qui inspirait le respect.

— Qui êtes-vous ? lui demandai-je.

Et, comme il ne répondait pas, je répétai :

— Qui êtes-vous ? Comment êtes-vous entré ici ? Que venez-vous faire ?

Il me regarda et dit :

— Vous ne me reconnaissez pas ?

— Non… non !

— Ah c’est vraiment curieux… Cherchez bien… un de vos amis… un ami d’un genre un peu spécial…

Je lui saisis le bras vivement :

— Vous mentez !… vous mentez !… non… vous n’êtes pas celui que vous dites… ce n’est pas vrai…

— Alors pourquoi pensez-vous à celui-là plutôt qu’à un autre ? dit-il en riant.

Ah ! ce rire ! ce rire jeune et clair, dont l’ironie amusante m’avait si souvent diverti !… Je frissonnai. Était-ce possible ?