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L’AGENCE BARNETT ET Cie

« Votre grand tort, Barnett, fut de n’avoir pas voulu admettre, comme intangible, cette vérité, si simple pourtant, qu’on ne peut pas être à deux endroits à la fois. Tout est là. M. Leboc, fumant à sa fenêtre, ne pouvait en même temps assassiner à la Chaumière. Tenez, M. Leboc est derrière nous, n’est-ce pas, et voici la grille de sa maison à dix pas, devant nous ? Eh bien, il est impossible d’imaginer un miracle par lequel M. Leboc serait à la fois derrière nous et à sa fenêtre. »

M. Formerie, juge d’instruction, sauta sur place et poussa une exclamation de stupeur.

« Qu’y a-t-il ? » lui demanda Béchoux.

Il tendit le doigt vers la maison.

« Là-bas… là-bas… »

À travers les barreaux de la grille, de l’autre côté de la pelouse, on apercevait, vingt mètres plus loin, en train de fumer sa pipe dans le décor de sa fenêtre ouverte, M. Leboc… M. Leboc qui pourtant se trouvait également près du groupe, sur le trottoir !

Vision d’horreur ! Hallucination ! Fantôme effrayant ! Ressemblance incroyable ! Qui donc jouait, là-bas, le rôle du véritable sieur Leboc que M. Formerie tenait par le bras ?

Béchoux avait ouvert la grille et courait. M. Formerie s’élança aussi vers l’image diabolique du sieur Leboc, qu’il interpellait et menaçait. Mais l’image ne semblait pas s’émouvoir et ne bougeait pas. Comment se fût-elle émue et comment eût-elle bougé, puisque — ils le constatèrent de plus près — ce n’était rien qu’une image, une toile qui remplissait exactement le cadre de la fenêtre, et qui offrait en profondeur, brossée de la même