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L’AGENCE BARNETT ET Cie

ma grand-mère, la jolie Dorothée, a eu comme soupirant le roi George IV lui-même, et qu’elle gardait les dix-huit lettres d’amour reçues de lui, dans les dix-huit tomes reliés en veau d’une édition de Richardson… une par volume. Or, à sa mort, notre famille a trouvé les volumes, sauf le quatorzième qui avait disparu avec la lettre numéro quatorze… la plus intéressante parce qu’elle prouve — on le savait — que la très jolie Dorothée a manqué à ses devoirs neuf mois avant la naissance de son fils aîné. Alors, vous comprenez, mon bon monsieur Vaucherel, comme nous serions heureux de retrouver cette lettre ! Les Lovendale, descendants du roi George ! Cousins du roi d’aujourd’hui ! Une telle chose nous vaudrait de la gloire, des titres ! »

Élisabeth Lovendale respira et, continuant le récit de sa démarche auprès du bonhomme Vaucherel, reprit :

« Et puis, mon bon monsieur Vaucherel, voilà qu’après trente ans de recherches et d’annonces, j’ai su que l’on avait vendu dans une vente publique un lot de volumes, dont le quatorzième tome de Richardson. Je cours chez l’acheteur, un bouquiniste du quai Voltaire, lequel me renvoie chez vous, à qui le livre appartient depuis hier.

« — En effet, me dit ce bon M. Vaucherel, qui me montra le tome XIV de Richardson.

« Regardez, lui dis-je, la lettre no 14 doit être dans le dos du volume, sous la reliure.

« Il regarde, devient tout pâle, et me dit :

« — Combien l’achetez-vous ?

« C’est là que j’ai vu ma bêtise. Si je n’avais pas parlé de la lettre, j’aurais eu le volume pour cinquante