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L’AGENCE BARNETT ET Cie

— Sans qu’il s’en doute ?

— Un homme filé par moi ne s’en doute jamais, chef. Et cependant, tout en ayant l’air de flâner, il en prenait des précautions, le brigand ! Il a contourné la place de l’Étoile, il a suivi l’avenue Kléber et il s’est arrêté au rond-point du Trocadéro, près d’une femme assise sur un banc, une sorte de Bohémienne, jolie, pittoresque avec son châle de couleur et le casque de ses cheveux noirs. Au bout d’une minute ou deux, ils ont parlé, sans remuer les lèvres presque, et en désignant du regard, plusieurs fois, une maison située au coin de l’avenue Kléber et de la place. Puis il s’est levé et il a pris le métro.

— Toujours filé par vous ?

— Oui. Malheureusement un train passait, dans lequel je n’ai pu, moi, monter à temps. Quand je suis revenu au rond-point, la bohémienne était partie.

— Mais cette maison qu’ils surveillaient, vous y avez été ?

— J’en arrive, chef. »

Et Béchoux scanda pompeusement :

« Au quatrième étage de cette maison, dans un appartement meublé, habite, depuis quatre semaines, le père de l’inculpé, le général en retraite Desroques, lequel, comme vous le savez, est venu de province pour défendre son fils accusé de rapt, de séquestration et d’assassinat. »

La phrase fit de l’effet, et le chef reprit :

« Vous vous êtes présenté chez le général ?

— Il m’a ouvert lui-même la porte, et tout de suite, je lui ai exposé la petite scène à laquelle j’avais assisté. Il n’en fut pas surpris. La veille, une Bohémienne était