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L’AGENCE BARNETT ET Cie

avec Barnett et s’indignait que le destin eût fait de lui le collaborateur et l’obligé de cet homme qu’il considérait comme un filou. Mais, hélas ! il y a des circonstances où les plus honnêtes fléchissent, et la perte de douze Africaines est au nombre de celles-là !

Étouffant ses scrupules, il murmura :

« C’est bien la concierge, n’est-ce pas ?

— C’est elle, pour cette raison entre beaucoup d’autres, que ce ne peut être qu’elle.

— Mais comment cette femme, si respectable jusque-là, a-t-elle pu commettre un tel acte ?

— Si tu avais eu la précaution élémentaire de prendre des renseignements sur elle, tu saurais que la malheureuse est affligée d’un fils qui est la pire des fripouilles et qui lui soutire tout son argent. C’est pour lui qu’elle a succombé à la tentation. »

Béchoux tressaillit.

« Elle a réussi à lui refiler mes Africaines ? dit-il en tremblant.

— Oh ! ça, non, je ne l’aurais pas permis. Tes douze Africaines, c’est sacré.

— Où sont-elles, alors ?

— Dans ta poche.

— Ne plaisante pas, Barnett.

— Je ne plaisante pas, Béchoux, quand il s’agit de choses aussi graves. Vérifie. »

Béchoux glissa vers la poche désignée une main timide, palpa et tira une large enveloppe ornée de cette adresse « À mon ami Béchoux. » Il la décacheta, aperçut ses Africaines, en compta douze, pâlit, vacilla sur ses jambes et renifla un flacon de sels que Barnett lui colla sous le nez.