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Mais aucune ombre ne passa dans le bois. Aucun murmure de voix ne lui parvint. Ceux qui se dissimulaient là-haut ne sortirent point de leurs retraites impénétrables.

Au bout de quelques minutes, la moitié du pont s’écroula, avec un grand fracas et un jaillissement d’étincelles. Mais l’autre moitié continua de se consumer et, à tout instant, il tombait dans le précipice un morceau de poutre qui éclairait la profondeur des ténèbres.

À chaque fois, Véronique éprouvait un soulagement. Ses nerfs exaspérés se détendaient. Un sentiment de sécurité l’envahissait, de plus en plus justifié à mesure que l’abîme devenait plus large entre elle et ses ennemis. Cependant elle resta dans le kiosque et résolut d’y attendre l’aube, afin de se rendre compte qu’aucune communication n’était possible désormais.

La brume s’accrut. L’obscurité enveloppa toutes choses. Vers le milieu de la nuit, elle entendit du bruit de l’autre côté, vers le haut de la colline autant qu’elle put en juger. C’était le bruit que font les bûcherons en abattant des arbres. La hache frappait régulièrement dans des branches que l’on achevait ensuite de casser.

Véronique eut l’idée, absurde d’ailleurs, elle le savait, qu’ils construisaient peut-être une passerelle, et elle serra fortement son fusil.

Au bout d’une heure, elle crut percevoir des gémissements et même un cri étouffé, puis, assez longtemps, des froissements de feuilles, des allées et venues. Cela cessa. De nouveau ce fut le grand silence où se confond tout ce qui remue, tout ce qui s’inquiète, tout ce qui frissonne, tout ce qui vit dans l’espace.

L’engourdissement de la fatigue et de la faim, qui commençait à la faire souffrir, laissait peu de pensées à Véronique. Elle se souvenait surtout que, n’ayant rapporté du village aucune provision, elle n’aurait pas de quoi manger. Elle ne se tourmentait pas, car elle était décidée, dès que la brume se déchirerait — et cela ne pouvait tarder — à allumer de grands feux avec les bidons d’essence. Elle songea même que la meilleure place serait l’extrémité de l’île, à l’endroit où s’élevait le dolmen.