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sa poche une lettre dont elle déplia les nombreux feuillets.

La première page portait, en haut, cette raison sociale :

Agence Dutreillis, Cabinet de Consultation, Renseignements confidentiels, Discrétion.

Puis, au-dessous, cette adresse :

« À Madame Véronique, modes, Besançon. »

Elle lut :

« Madame,

« Vous ne sauriez croire avec quel plaisir je me suis acquitté de la double mission dont vous avez bien voulu me charger par votre honorée de ce mois de mai 1917. Je n’ai jamais oublié les conditions dans lesquelles il me fut possible, il y a quatorze ans, de vous prêter mon concours efficace, lors des pénibles événements qui assombrirent votre existence. C’est moi, en effet, qui ai pu obtenir toutes les certitudes relatives à la mort de votre cher et respectable père, M. Antoine d’Hergemont, et de votre bien-aimé fils François, — première victoire d’une carrière qui devait en fournir tant d’autres éclatantes.

« C’est moi aussi, ne l’oubliez pas, qui, sur votre demande, et voyant combien il était utile de vous soustraire à la haine, et, disons le mot, l’amour de votre mari, ai fait les démarches nécessaires à votre entrée au couvent des Carmélites. C’est moi enfin qui, votre retraite dans ce couvent vous ayant montré que la vie religieuse était contraire à votre nature, vous ai procuré cette humble place de modiste à Besançon, loin des villes où s’étaient écoulées les années de votre enfance et les semaine de votre mariage. Vous aviez du goût, le besoin de travailler pour vivre et pour ne pas penser. Vous deviez réussir. Vous avez réussi.

« Et maintenant arrivons au fait, au double fait qui nous occupe.

« Tout d’abord, la première question. Qu’est devenu dans la tourmente votre mari, le sieur Alexis Vorski.