— Pourquoi attendre ? S’il y a quelque chose, un danger quelconque, c’est au Prieuré…
— C’est juste. Dépêchons-nous. »
Elles hâtèrent le pas, envahies de pressentiments, puis, sans motif, se mirent à courir, tellement leurs appréhensions s’exaspéraient aux approches de la réalité.
L’îlot se resserrait de nouveau, barré par un mur bas qui limitait le domaine du Prieuré. À ce moment, des cris se firent entendre qui venaient de l’habitation.
Honorine s’exclama :
« On appelle ! Vous avez entendu ? Des cris de femme !… C’est la cuisinière !… C’est Marie Le Goff… »
Elle se précipita sur la grille, empoigna la clef, mais d’une main si maladroite qu’elle mêla la serrure et ne put ouvrir.
« Par la brèche ! ordonna-t-elle… Tenez, à droite !… »
Elles s’élancèrent, franchirent le mur et traversèrent une large pelouse hérissée de ruines, et où le sentier tortueux et mal tracé se perdait à tout instant sous des traînées de lierre et de mousse.
« Nous voilà ! nous voilà ! proférait Honorine. Nous arrivons ! »
Et elle mâchonnait :
« On ne crie plus ! c’est effrayant… Ah ! cette pauvre Marie Le Goff… »
Elle saisit le bras de Véronique.
« Faisons le tour. La façade est de l’autre côté… Par ici, les portes sont toujours fermées et les volets mis aux fenêtres. »
Mais Véronique s’empêtra dans des racines, trébucha et tomba à genoux. Quand elle se releva, la Bretonne l’avait quittée et contournait l’aile gauche. Inconsciemment, Véronique, au lieu de la suivre, fila droit vers la maison, escalada le perron et se heurta contre la porte close, qu’elle frappa à coups redoublés.
L’idée de faire le tour comme Honorine lui semblait une perte de temps que rien ne pourrait jamais réparer. Cependant, devant la vanité de ses efforts, elle allait s’y