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val, offrant comme elles des vestiges de sacrifices.

Vorski ne quittait pas des yeux le bâton de métal. Chose étrange, ce métal brillait, comme si nulle poussière ne l’eût couvert. Vorski avança la main.

« Non, non, fit vivement Conrad.

— Et pourquoi ?

— C’est peut-être cela que Maguennoc a touché et qui lui a brûlé la main.

— Tu es fou.

— Cependant…

— Eh ! je ne crains rien, » déclara Vorski en saisissant l’objet.

C’était un sceptre de plomb travaillé fort grossièrement, mais qui révélait pourtant un certain effort artistique. Sur le manche s’enroulait un serpent, tantôt incrusté dans le plomb et tantôt en relief. La tête, énorme et disproportionnée de ce serpent formait le pommeau et se hérissait de clous d’argent et de petits cailloux verts transparents comme des émeraudes.

« Est-ce la Pierre-Dieu ? » murmura Vorski.

Il maniait l’objet et l’examinait en tous sens avec une crainte respectueuse, et il ne tarda pas à s’apercevoir que le pommeau branlait de façon imperceptible. Il le remua, le tourna à droite, puis à gauche, et, finalement, il y eut un déclenchement : la tête du serpent se dévissait.

À l’intérieur, un vide était ménagé. Dans ce vide, une pierre… une pierre menue, de couleur rougeâtre, avec des veines jaunes qui ressemblaient à des veines d’or.

« C’est elle ! oh ! c’est elle ! » prononça Vorski, bouleversé.

« N’y touchez pas ! répéta Conrad, plein d’effroi.

— Ce qui a brûlé Maguennoc ne brûlera pas Vorski, » répondit-il gravement.

Et par forfanterie, débordant d’orgueil et de joie, il gardait la pierre mystérieuse au fond de sa main fermée, qu’il serrait de toutes ses forces.

« Qu’elle me brûle, j’y consens ! Qu’elle entre dans ma chair, j’en serai heureux. »

Conrad lui fit un signe et mit un doigt sur sa bouche.