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— Il dispose du canot automobile.

— S’il n’est pas venu, c’est qu’il ne connaît ni cette baie ni cette descente, lesquelles sont invisibles au large, et défendues, d’ailleurs, par mille pointes de récifs.

— Et qui nous empêche de partir tout de suite ?

— La nuit, maman. Si bon marin que je sois, si habitué à toutes les passes qui permettent de s’éloigner de Sarek, je ne suis pas du tout sûr de ne pas échouer sur quelque écueil. Non, il faut attendre le jour.

— Comme c’est long !

— Quelques heures de patience, maman. Et nous sommes ensemble ! Dès l’aube, on s’embarque, et nous commençons par suivre le pied de la falaise jusqu’au-dessous des cellules. Là, nous recueillons Stéphane qui, forcément, nous attend sur quelque plage, et nous filons tous les quatre ; n’est-ce pas, Tout-Va-Bien ? Vers midi, nous abordons à Pont-l’Abbé. Voilà mon plan. »

Véronique débordait de joie et d’admiration. Elle s’étonnait qu’un enfant pût faire preuve d’un tel sang-froid !

« C’est parfait, mon chéri, et tu as raison en tout. Décidément la chance tourne de notre côté. »

La soirée s’écoula sans incidents. Une alerte pourtant, du bruit sous les décombres qui obstruaient le souterrain, et un rayon lumineux qui filtra par une fente, les obligea à monter la garde jusqu’au moment du départ. Mais leur bonne humeur n’en fut pas altérée.

« Mais oui, mais oui, je suis tranquille, disait François. Dès l’instant où je t’ai retrouvée, j’ai senti que c’était pour toujours. D’ailleurs, en dernier ressort, ne nous reste-t-il pas un espoir suprême ? Stéphane t’en a parlé, n’est-ce pas ? et cela te fait rire, cette confiance dans un sauveur que je n’ai jamais vu… Eh bien, je te le dis, maman, alors même que je verrais un poignard levé sur moi, je serais certain, tu entends, absolument certain qu’une main arrêterait le coup.

— Hélas ! dit-elle, cette main providentielle n’a pas empêché tous les malheurs que je t’ai racontés.

— Elle écartera ceux qui menacent ma mère, affirma l’enfant.