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occupations. Les larmes seules lui semblaient dignes d’une attention particulière. Or, Véronique et François ne pleuraient pas.

« Tu vois, maman, Tout-Va-Bien est de mon avis, rien n’est perdu… mais, en vérité, mon vieux Tout-Va-Bien, tu as du flair. Hein qu’aurais-tu dit si nous avions quitté l’île sans toi ? »

Véronique regarda son fils.

« Quitter l’île ?

— Certes, et le plus tôt possible. C’est là mon projet, qu’en dis-tu ?

— Mais comment s’en aller ?

— En barque.

— Il y en a une par ici ?

— La mienne.

— Où ?

— Tout près d’ici, à la pointe même de Sarek.

— On peut donc descendre ? La falaise est à pic, cependant.

— C’est à l’endroit même où elle est le plus abrupte, un endroit qu’on appelle la Poterne. C’est ce nom qui nous a intrigués Stéphane et moi. Une poterne, cela indique une entrée, une sortie. Or, nous avons fini par apprendre qu’au moyen âge, du temps même des moines, l’îlot du Prieuré était entouré de remparts. Il était donc à supposer qu’il y avait eu là une poterne qui commandait une issue vers la mer. Et, de fait, après quelques recherches effectuées avec Maguennoc, nous avons découvert, dans le plateau de la falaise, comme une faille, une dépression remplie de sable, et maintenue de place en place par de véritables murs en gros moellons. Un sentier tourne au milieu, avec des marches et des fenêtres du côté de la mer, et conduit jusqu’à une petite baie. C’est l’issue de la poterne. Nous l’avons remise en état, et ma barque est suspendue au pied de la falaise. »

Le visage de Véronique se transformait.

« Mais alors, nous sommes sauvés, cette fois !

— Sans le moindre doute.

— Et l’ennemi ne peut pas venir par là ?

— Comment ?