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— Le voilà… mon chéri… tais-toi… le voilà… regarde-le…  »

L’autre passa. Il marchait lentement, un peu courbé, l’oreille aux aguets. Il parut à Véronique exactement de la même grandeur que son fils, et, cette fois, en le regardant de façon plus attentive, elle ne s’étonna pas trop qu’Honorine et M. d’Hergemont se fussent trompés, car il existait réellement des points de ressemblance qu’avait dû accentuer le port du béret rouge dérobé à François.

Il s’éloigna.

« Tu le connais ? demanda Véronique.

— Non, maman.

— Tu es certain de ne l’avoir jamais vu ?

— Certain.

— Et c’est bien lui qui s’est jeté sur toi, dans la cellule, avec la femme ?

— Je n’en doute pas, maman. Il m’a même frappé au visage, sans raison, avec une véritable haine.

— Ah ! dit-elle, tout cela est incompréhensible. Quand donc échapperons-nous de ce cauchemar !

— Vite, maman, le chemin est libre. Profitons-en.  »

Sous la lumière, elle vit qu’il était tout pâle, et elle sentit sa main glacée dans la sienne. Pourtant il lui sourit d’un air heureux.

Ils repartirent, et, bientôt, après avoir franchi le pan de falaise qui réunissait les deux îles, et remonté les escaliers, ils débouchaient en plein air, à droite du jardin de Maguennoc. Le jour commençait à baisser.

« Nous sommes sauvés, dit Véronique.

— Oui, objecta l’enfant, mais à condition que l’on ne puisse pas nous rejoindre par le même chemin. Il s’agit donc de le barrer.

— Comment ?

— Attends-moi, je vais chercher des instruments au Prieuré.

— Oh ! non, ne nous quittons pas, François.

— Allons-y ensemble, maman.

— Et si l’ennemi arrive pendant ce temps ? Non, il faut défendre cette sortie.