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l’aura frappé… au point même qu’il inscrivit en tête mes initiales de jeune fille : V. d’H ?… »

Et elle ajouta, d’une voix plus basse :

« Et tout s’est passé selon les termes de l’inscription… »

Ils se turent. Comment n’auraient-ils pas songé à ces termes eux-mêmes, aux mots tracés, depuis des siècles, sur la page du missel et sur la pierre du Dolmen ? Si le destin n’avait encore offert aux trente cercueils de Sarek que vingt-sept victimes, est-ce que les trois dernières n’étaient pas là toutes prêtes compléter l’holocauste, tout trois enfermées, toutes trois captives au pouvoir de sacrificateurs ? Et si, au sommet de la butte, près du Grand-Chêne, ne se dressait encore qu’un triangle de croix, la quatrième n’allait-elle pas surgir bientôt pour une quatrième condamnée ?

« François tarde beaucoup, » prononça Véronique, au bout d’un instant.

Elle s’approcha de l’abîme. L’échelle n’avait pas bougé, toujours accessible.

Stéphane dit à son tour :

« Les autres vont venir à ma porte… Il est étonnant qu’ils ne soient pas encore venus. »

Mais ils ne voulaient pas s’avouer mutuellement leur anxiété ; et Véronique reprit, d’une voix calme :

« Et le trésor ? La Pierre-Dieu ?

— L’énigme n’est guère moins obscure, dit Stéphane, et elle ne repose également que sur un vers de l’inscription, le dernier :

« La Pierre-Dieu qui donne mort ou vie. »

« Qu’est-ce que c’est que cette Pierre-Dieu ? La tradition veut que ce soit une pierre de miracle, et, selon M. d’Hergemont, c’est là une croyance qui remonterait aux époques les plus lointaines. De tout temps, à Sarek, on a cru à l’existence d’une pierre capable d’opérer des prodiges. Au moyen âge, on venait avec des enfants chétifs et difformes, que l’on étendait durant des jours et des nuits sur cette pierre, et qui se relevaient sains de corps et robustes. Les femmes stériles recouraient utilement au même remède, ainsi que les vieillards, que les