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fois mort, plus mort qu’on ne peut l’être… Et tu vis ! et tu es là ! et je te touche ! Ah ! mon Dieu ! est-ce possible ! j’ai un fils… mon fils est vivant… »

Et lui reprenait de son côté, avec la même ferveur passionnée :

« Maman… maman… je t’ai attendue si longtemps ! Pour moi, tu n’étais pas morte, mais c’était si triste d’être un enfant et de n’avoir pas de mère… de voir les années s’en aller et de les perdre à t’attendre. »

Durant une heure, ils parlèrent à l’aventure, du passé, du présent, de cent choses qui toutes leur paraissaient d’abord les plus intéressantes du monde, et qu’ils abandonnaient aussitôt pour se poser d’autres questions, et pour tâcher de se connaître un peu plus et de pénétrer davantage dans le secret de leur vie et dans l’intimité de leur âme.

Ce fut François qui, le premier, voulut mettre un peu d’ordre dans leur conversation.

« Écoute, maman, nous avons tant à nous dire, qu’il faut renoncer à tout nous dire aujourd’hui, et même durant des jours et des jours. Pour l’instant causons de ce qui est indispensable, et en quelques mots, car nous avons peut-être peu de temps.

— Comment ? fit Véronique, déjà inquiète. Mais je ne te quitte pas !

— Pour ne pas nous quitter, maman, il faut d’abord que nous soyons réunis. Or, il y a beaucoup d’obstacles à renverser, quand ce ne serait que ce mur qui nous sépare. En outre, je suis très surveillé et, d’une minute à l’autre, je peux être contraint de t’éloigner, comme je le fais avec Tout-Va-Bien, au moindre bruit de pas qui s’approchent.

— Surveillé par qui ?

— Par ceux qui se sont jetés sur Stéphane et sur moi le jour où nous avons découvert l’entrée de ces grottes, sous les landes du plateau, les Landes-Noires.

— Tu les as vus, ceux-là ?

— Non, c’était dans l’ombre.

— Mais qui sont ces êtres ? qui sont ces ennemis ?

— Je l’ignore.