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L’ÉCLAT D’OBUS


V

LA PAYSANNE DE CORVIGNY



Trois semaines auparavant, en apprenant que la guerre était déclarée, Paul avait senti sourdre en lui, immédiate et implacable, la résolution de se faire tuer.

Le désastre de sa vie, l’horreur de son mariage avec une femme qu’au fond il ne cessait pas d’aimer, les certitudes acquises au château d’Ornequin, tout cela l’avait bouleversé à un tel point que la mort lui apparut comme un bienfait.

Pour lui, la guerre, ce fut, instantanément et sans le moindre débat, la mort. Tout ce qu’il pouvait admirer d’émouvant et de grave, de réconfortant et de magnifique, dans les événements de ces premières semaines, l’ordre parfait de la mobilisation, l’enthousiasme des soldats, l’unité admirable de la France, le réveil de l’âme nationale, aucun de ces grands spectacles n’attira son attention. Au plus profond de lui-même il avait décrété qu’il accomplirait de tels actes que la chance la plus invraisemblable ne pourrait le sauver.

C’est ainsi qu’il avait cru trouver, dès le premier jour, l’occasion voulue. S’emparer de