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L’ÉCLAT D’OBUS
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Un poste de gendarmes allemands campait au pied du poteau et l’on apercevait une route blanche où défilaient des uhlans.

Au delà, un amas de toits rouges et de jardins. Était-ce la petite ville où jadis son père et lui avaient loué des bicyclettes, la petite ville d’Ébrecourt ?

La cloche mélancolique n’avait pas cessé. Il se rendait compte que le son venait de France, et même qu’une autre cloche sonnait quelque part, en France également, et une troisième du côté du Liseron, et toutes trois avec la même hâte, comme si elles lançaient autour d’elles un appel éperdu.

Il répéta anxieusement :

— Le tocsin… le tocsin… Et cela passe d’église en église… Est-ce que ce serait… ?

Mais il chassa la terrifiante pensée. Non, non, il entendait mal, ou bien c’était l’écho d’une seule cloche qui rebondissait au creux des vallées, et roulait sur les plaines.

Cependant il regardait la route blanche qui sortait de la petite ville allemande, et il observa qu’un flot continu de cavaliers arrivait par là et se répandait dans la campagne. En outre, un détachement de dragons français surgit à la crête d’une colline. À la lorgnette, l’officier étudia l’horizon, puis repartit avec ses hommes.

Alors, ne pouvant aller plus loin, Paul s’en retourna jusqu’au mur qu’il avait franchi, et constata que ce mur encerclait bien tout le domaine, bois et parc. Il apprit d’ailleurs d’un vieux paysan que la construction en remontait à une douzaine d’années, ce qui expliquait pourquoi, dans ses explorations le long de la frontière, Paul n’avait jamais retrouvé la cha-