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L’ÉCLAT D’OBUS
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du crime. Si la chapelle est bien là, dans les bois, la vérité sera complète.

Il marcha résolument vers cette vérité. Il la redoutait moins puisqu’il ne pouvait plus se dérober à son étreinte. Et, cependant, comme son cœur battait à grands coups douloureux, et combien l’impression lui était affreuse, de faire ce chemin qui conduisait à celui que suivait son père seize ans auparavant !

Un geste vague de Jérôme lui avait enseigné la direction. Il traversa le parc, du côté de la frontière, en obliquant sur sa gauche, et passa près d’un pavillon. À l’entrée des bois s’ouvrait une longue allée de sapins dans laquelle il s’engagea et qui, cinq cents pas plus loin, se divisait en trois allées plus étroites. Deux d’entre elles, qu’il explora, aboutissaient à des fourrés inextricables. La troisième menait au sommet d’un tertre, d’où il redescendit, encore à sa gauche, par une autre allée de sapins.

Et, en choisissant celle-ci, Paul se rendit compte que le motif de son choix était précisément que cette allée de sapins éveillait en lui, il n’aurait su dire par quelles similitudes de forme et de disposition, des réminiscences qui guidaient ses pas.

Droite d’abord assez longtemps, l’allée fit un coude brusque dans une futaie de grands hêtres, dont les dômes de feuillage se rejoignaient ; puis elle se redressa et, au bout de la voûte obscure sous quoi elle cheminait, Paul aperçut cet épanouissement de lumière qui indique l’ouverture d’un rond-point.

En vérité, l’angoisse lui brisa les jambes et il dut faire un effort pour avancer. Était-ce la clairière où son père avait reçu le coup mortel ?