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L’ÉCLAT D’OBUS
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face de Soissons, de l’autre côté de l’Aisne. L’avant-veille, des bataillons de chasseurs et de Marocains avaient pris d’assaut l’éperon 132. La veille, on maintenait les positions conquises et l’on enlevait les tranchées de la dent de Crouy.

Or, au cours de la nuit précédente, au moment même où l’ennemi contre-attaquait violemment, il se produisit un fait assez bizarre. L’Aisne, grossissant à la suite des pluies abondantes, débordait et emportait tous les ponts de Villeneuve et de Soissons.

La crue de l’Aisne était normale, mais, si forte qu’elle fût, elle n’expliquait pas la rupture des ponts, et cette rupture, coïncidant avec la contre-attaque allemande, et qui semblait provoquée par des moyens suspects que l’on tâchait d’éclaircir, avait compliqué la situation des troupes françaises en rendant presque impossible l’envoi de renforts. Toute la journée, on s’était maintenu sur l’éperon, mais difficilement et avec beaucoup de pertes. En ce moment on ramenait sur la rive droite de l’Aisne une partie de l’artillerie.

Paul et Bernard n’eurent pas une seconde d’hésitation. Dans tout cela ils reconnaissaient la main de la comtesse Hermine. Rupture des ponts, attaques allemandes, les deux événements se produisant la nuit même de son arrivée, comment douter qu’ils ne fussent la conséquence d’un plan conçu par elle et dont l’exécution, préparée pour l’époque où les pluies grossiraient l’Aisne, prouvait la collaboration de la comtesse et de l’état-major ennemi.

D’ailleurs, Paul se rappelait les phrases