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L’ÉCLAT D’OBUS
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Non, il faut en finir d’une façon ou d’une autre, et vous admettrez bien…

« À partir de ce moment, je n’ai plus entendu. Elle était en face de mon père, hostile, véhémente. Son visage se contractait avec une expression vraiment féroce qui me faisait peur. Ah ! comment n’ai-je pas prévu ?… Mais j’étais si jeune ! Et puis, cela se passa si vite !… En s’avançant vers mon père, elle l’accula pour ainsi dire jusqu’au pied d’un gros arbre, à droite de la chapelle. Leurs voix s’élevèrent. Elle eut un geste de menace. Il se mit à rire. Et ce fut brusque, immédiat : d’un coup de couteau — ah ! cette lame dont je vis soudain la lueur dans l’ombre ! — elle le frappa en pleine poitrine, deux fois… deux fois, là, en pleine poitrine. Mon père tomba. »

Paul Delroze s’était arrêté, tout pâle au souvenir du crime.

— Ah ! balbutia Élisabeth, ton père a été assassiné… Mon pauvre Paul, mon pauvre ami…

Et elle reprit, haletante d’angoisse :

— Alors, Paul, qu’est-il advenu ? vous avez crié ?…

— J’ai crié, je me suis élancé vers lui, mais une main implacable me saisit. C’était l’individu, le domestique, qui surgissait du bois et m’empoignait. Je vis son couteau levé au-dessus de ma tête. Je sentis un choc terrible à l’épaule. À mon tour, je tombai.