Page:Leblanc - L'Enthousiasme, 1901.djvu/97

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
89
L’ENTHOUSIASME

cieux. Plus on dépense de vie, et plus on en reçoit du dehors. L’échange est perpétuel. Le frôlement de l’air vous en donne, et l’éclat d’une couleur, et le chant d’une musique, et surtout, surtout la lèvre des femmes.

Vers la fin de septembre, mère me dit :

— Eh bien, tu as réfléchi depuis un an, que comptes-tu faire ?

— Ma foi, rien du tout.

— Comment rien ! s’écria-t-elle scandalisée, mais un homme doit travailler, ton grand-père a travaillé toute son existence, ton père aussi.

— C’est justement ce qui me permet de n’en pas faire autant ! Pourquoi ne profiterais-je pas de leur travail pour agir d’abord selon mon goût ?

— Alors ton goût, c’est le plaisir, la flânerie, maintenant… Je n’aurais jamais cru…

— Oh ! mère, tu te trompes, j’emploie très bien mon temps et à des choses aussi importantes que si j’étudiais le droit.

Quelles choses ? Ma réponse n’était point pour la satisfaire. Son visage perplexe m’apprit qu’elle cherchait un argument dont la masse m’ébranlât. L’ayant trouvé, elle prononça gravement :

— Pascal, on n’est pas content de toi à Saint-Jore.

Je ne pus m’empêcher de rire.

— On n’est pas content de moi à Saint-Jore ? Ah ! quel dommage !

— Ne plaisante pas, ce ne sont plus des bruits