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L’ENTHOUSIASME

arbustes, je frappais la terre, et je riais aux éclats.

— Geneviève m’aime ! je suis aimé !

Accoudée à la balustrade, elle ne m’entendit pas revenir. J’attachai mes lèvres aux franges d’un fichu qui recouvrait ses épaules. Elle ne bougea pas. Peut-être m’eût-elle accordé des faveurs plus précieuses. Mais la crainte de l’offenser m’arrêta.

Elle me dit :

— Philippe préfère ne pas demeurer au château, c’est un peu loin des usines. Je suis donc obligée de retourner à la maison ; seulement, toutes les après-midi, vous m’attendrez ici.

— Et tous les soirs, Geneviève, vous dinerez avec nous, et quand Philippe n’y sera pas, je vous accompagnerai jusqu’à votre porte.

Elle sourit.

— Ce n’est pas encore assez, Pascal, et le matin ?

— Je confierai des fleurs à la rivière, lui dis-je en plaisantant, et vous les recevrez au bas de votre jardin. C’est ainsi qu’Inès de Castro, que l’on appelait Port de Héron à cause de sa noble démarche, envoyait des lettres à son amant.

L’idée l’amusa au point qu’elle voulut l’exécuter, mais les fleurs se perdaient aux détours de la rivière, et chaque jour les nécessités de ma poursuite me conduisaient auprès de Geneviève.

Une absence de grand-père en septembre nous valut, à M. et Mme Darzas, ma mère, ma sœur et moi, une fin de saison fort agréable. Nous qui devions nous faire tant de mal les uns aux autres,