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L’ENTHOUSIASME

parlait avec une émotion profonde, moins en mère qui juge qu’en amie qui comprend, qui se souvient, et dont l’âme peut-être se voile d’un peu de mélancolie.

Elle chuchota :

— Oui, il y a là quelque chose de sacré, un droit à la révolte dans certains cas et devant certains obstacles. C’est un bonheur auquel on doit tenir beaucoup.

— Plus qu’à tout, mère, car il vaut mieux que tout.

— Oui, oui, aussi je te laisserai libre. En continuant de lutter, j’irais au delà de mon devoir.

— Alors, mère, tu m’excuseras si j’emmène Geneviève ?

— Cela ne sera pas, Pascal, de toi-même tu y renonceras.

— Y renoncer, pourquoi ?

— Parce que c’est fini.

Je me rappelle avoir baissé la tête sans un mot. Hélas ! ne le savais-je pas que c’était fini et que cette crise marquait le terme d’une époque ? Je me rappelle aussi le beau ciel bleu de ce jour-là, le goût de l’air que m’offre la fenêtre ouverte, et l’odeur ardente des vernis du Japon qui monte de la place. Oh ! toutes ces adorables sensations, si vaines maintenant !

Et mère insistait :

— Tu renonceras parce que Geneviève ne t’aime pas comme tu l’aimes. Elle t’aime autant, mais