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L’ENTHOUSIASME

— Pourquoi as-tu été chez elle ?

— Ne causons pas, veux-tu, Pascal ?

Mais un rayon de lune illumine les rideaux de la fenêtre, et mon désespoir éclate.

— La lune, mère ! il aurait fait beau… ah ! comprends-tu, c’est toute ma vie… toute ma vie qui s’en va…

Elle m’attire dans ses bras, elle me berce, et chuchote avec une intuition touchante des seules paroles qui puissent me consoler :

— Pascal, il a fallu que je me mette à ses genoux pour l’empêcher de venir…

— Elle serait venue, n’est-ce pas ? lui dis-je avidement, j’en étais sûr, je n’ai pas douté d’elle un instant depuis hier… mais qui t’a avertie ? il n’y avait que Geneviève et moi qui savions…

— Ne m’interroge pas, là-dessus, Pascal, je peux te dire simplement qu’à dix heures j’étais auprès de Geneviève, qu’elle a fini par tout m’avouer, et que ce n’est qu’au dernier moment, devant mes larmes et mes prières, qu’elle a cédé. Mais elle a voulu que j’aille te chercher moi-même.

— Et tu n’as rien à me dire de sa part ?

— Voici ses derniers mots : « Vous lui direz que je ne l’ai jamais tant aimé et que je lui demande pardon… »

— Est-ce qu’elle pleurait ?

— Elle n’a pas cessé de pleurer.

…De la fièvre, des nuits de délire… Mère ne