Page:Leblanc - L'Enthousiasme, 1901.djvu/245

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
237
L’ENTHOUSIASME

pour me surveiller… et la peur de mourir en ce garni misérable, une peur si précise que je criais à la femme :

— Je veux bien mourir, seulement, pas avant… plus tard…

Et puis, le vendredi, j’étais mieux. Une pluie abondante rafraichit le temps. Il m’en coulait des gouttes sur la tête, tandis que j’inspectais la rue. Je ne doutais pas que mon vœu ne se réalisât le jour même. Et de fait, à cinq heures de l’après-midi, Philippe passait sous ma fenêtre, se dirigeant vers le centre de la ville.

À haute voix je prononçai :

— Allons, c’est l’heure.

Je descendis les cinq étages et marchai droit à la grille du dépôt. Dans la cour, un groupe d’employés déchargeait un camion. Insouciant de ce qu’ils pourraient dire, je feignis de m’intéresser à leur travail, ce qui me permettait d’épier le comptable à travers les vitres de son bureau. Au premier moment propice, je me hâtai vers la porte : il ne me vit point. En bas, je tergiversai. Fallait-il sonner et demander hardiment si Mme Darzas recevait ? À quoi bon des précautions, des expédients tardifs ! J’entrai.

Et je n’avais pas mis le pied sur les dalles du vestibule que Geneviève me saisit et m’entraina.

— Viens, viens vite.

Sans un mot, je montai derrière elle jusqu’au haut de la maison et la suivis par un couloir