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L’ENTHOUSIASME

rien, à Philippe… tout ce que je puis dire, c’est qu’il n’est pas gai.

— Berthe, allez ce soir chez Geneviève et dites-lui…

— Mais vous êtes fou, Pascal ?

— Vous irez, Berthe, je ne doute pas que vous y alliez, puisque c’est pour l’avertir de mon départ.

— Tu t’en vas ?

— Oui.

Elle m’observa longuement, puis me demanda :

— Quand reviens-tu ?

— Dans un an, dans deux ans, je l’ignore.

— Alors… tu ne l’aimes plus ?

— Si, mais j’en ai assez de cette existence.

Un mauvais sourire plissa ses lèvres.

— En ce cas j’irai la voir… tu as bien fait de t’adresser à moi… il est certain que j’irai l’avertir moi-même.

Au déjeuner, j’annonçai mon voyage à mère. Elle s’en montra plutôt inquiète, pressentant quelque nouvelle complication.

Vers trois heures, Claire arriva de Bellefeuille. Elle déclara simplement :

— Catherine est morte.

Sa douleur m’effraya, une de ces douleurs contenues où l’on devine un cerveau prêt à se rompre, une gorge nouée, des sanglots qui s’accumulent autour du cœur sans trouver d’issue. Je lui dis :

— Il y a eu hier soir un esclandre abominable