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L’ENTHOUSIASME

avec les autres, au cas où le désaccord se produirait plus ouvertement ?

En décembre la sous-préfecture organisa une kermesse au profit des pauvres, et les dames les plus en vue acceptèrent de présider à l’aménagement des diverses boutiques. Berthe Landol et quelques amies se chargèrent des fleurs. Or, deux de ces amies s’étant récusées au dernier moment, Geneviève sur la prière de sa sœur et sur le conseil de son mari, dut prendre place au comptoir. Cet incident, que mère ignora, me fut rapporté. Incapable de résister à l’attrait d’une rencontre, je me mêlai à la foule des visiteurs.

Une louable circonspection, jointe à des efforts de volonté incroyables, me retint assez longtemps près d’un étalage de vide-poches en osier, vêtus de satins multicolores, dont les vendeuses m’octroyaient tous les spécimens sans que je fisse la moindre attention à leurs remerciements. De là, je voyais Geneviève.

Elle avait une robe de drap gris à parements de drap mauve, et une capote de tulle suivait les ondulations symétriques de ses cheveux blonds. Elle souriait aux acheteurs. Elle leur offrait des touffes de violettes et des gerbes de roses pâles. Elle ornait de fleurs les cheveux des petites filles. C’était ma maîtresse. Ma maîtresse ! nulle autre n’avait un tel charme et tant de beauté rayonnante. Sa bouche gracieuse, la fraicheur de ses joues, l’expression jeune et mobile de sa physionomie, la distinguaient