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IX

Les habitants de Saint-Jore-en-Houlme auraient pu remarquer le lendemain matin un fils Devrieux qui n’avait plus ses allures habituelles de chasseur à l’affût ou de sauvage sur la piste de guerre. Point d’arrêt subit devant les vitrines ou au détour des rues. Je marchais délibérément, la tête haute, en homme qui sait où il va. Au fond j’étais fou. Éclater de rire ou me mettre à crier : « Je suis l’amant de Mme Darzas » étaient les actes que mon esprit proposait comme les mieux appropriés à la situation. Jamais je n’ai vu tant de joie sur un visage que sur celui qui m’apparut dans la glace du confiseur de la rue Charlotte-Corday. Le Cercle n’était pas ouvert, sans quoi j’aurais été dire à ces messieurs : « Somme toute, vous avez raison. L’expérience m’a prouvé que la société est merveilleusement constituée, et qu’il ne faut toucher à rien de ce qui est, car tout est bien, tout est juste, tout est parfait. » Et cette abjuration de mes erreurs m’eût été facile puisque le destin avait réparé ses