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L’ENTHOUSIASME

on remplit un devoir. Mme Landol resta sous mes yeux, à moitié dévêtue, embarrassée de sa gorge inutile et le visage balafré de larmes noires. Pardonnerait-elle cette humiliation ?

Le lendemain matin, ayant appris que Philippe s’absentait, j’envoyai chez Mme Darzas un commissionnaire avec ce mot :

« Tantôt, à trois heures, au haut de la vieille ville, dans le Clos Guillaume. Prenez le petit pont et montez par les rampes de droite. Moi, je traverserai en barque, du côté des prairies, et je monterai par la gauche. Aucun danger. De la terrasse, on aperçoit le grand pont par où l’on passe toujours pour venir dans la vieille ville, et l’on reconnaît très bien les personnes. Si vous n’y êtes pas à cinq heures, j’irai chez vous. »

Une partie de l’emplacement où s’élevait au moyen âge la forteresse de Saint-Jore-en-Houlme est un terrain vague qui sert quelquefois aux exercices de la garnison. La partie la plus avancée, celle qui surplombe l’Orne, a été transformée en un petit jardin que l’on appelle le Clos Guillaume, du nom de la tour dont il encadre les derniers vestiges. Humide et sombre, planté de cyprès et de saules, formé de plates-bandes étroites où gisent des reliques du passé, vieilles pierres, fûts de colonnes, dalles moisies, il ressemble plutôt à un cimetière abandonné. Mais une paix profonde y demeure, et il n’est point de charme plus riant que