Page:Leblanc - L'Enthousiasme, 1901.djvu/136

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
128
L’ENTHOUSIASME

ment sont à la racine d’âmes très vulgaires qui se flétrissent souvent sans que l’occasion fasse monter en elles cette sève de vie, bonne ou mauvaise. Malheureusement la curiosité que Berthe m’inspire aujourd’hui, je ne l’eus point quand il m’était loisible de l’assouvir, et j’ignore son passé, sa misère spéciale, le secret de sa méchanceté, les raisons de sa conduite avec moi et de son acharnement contre sa sœur. Je ne pensais qu’à Geneviève, j’avais déjà oublié l’absurdité de ma démarche, et je cherchais d’autres expédients.

Le réveil fut brusque. Berthe avait entr’ouvert le corsage de son peignoir, et, m’entourant de ses bras nus, elle appuyait sur mon visage sa gorge tiède. Je fus près d’y mordre. Mes dents, mes lèvres en étaient avides.

— Pascal, ne me refuse pas, je suis disposée à tout… je t’aiderai pour Geneviève… Toute seule, elle n’osera pas… je te l’amènerai.. Pascal, je m’y engage… elle sera ta maitresse… ici même.

Plus que la volupté, cette promesse me tenta ; je ne doutais pas que Berthe la tint dans l’espoir d’abimer notre amour par la trahison, et la possession de Geneviève valait bien l’ennui de quelques caresses. Cependant je ne pus me résigner à une telle déchéance.

Des devoirs sacrés sanctifiaient mon corps. Je repoussai Berthe.

Peut-être eussé-je dû me dérober avec plus de souplesse, Mais il est rare qu’on soit adroit quand