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rable. Mais peu à peu le style devenait laborieux et ampoulé, les comparaisons trop hardies et trop fréquentes. Il ne se découragea pas. Ces défauts se corrigent. D’ailleurs, s’il échouait en ce genre, d’autres aptitudes l’en dédommageraient.

Simplement il se soumit aux sensations.

Elles lui étaient profitables, toutes imprégnées du grand sommeil où de loin paraît s’engourdir la nature. L’aspect en est immuable. Les contours des monts actuels sont ceux des temps passés, et seront toujours les mêmes. La matière en repos dégage de l’apaisement. Rien n’oblige à réfléchir. On jouit de la pureté des lignes et de la grâce des formes.

Et Naples ne s’opposait pas à cet assoupissement des choses. Petite dans l’énormité du cadre, elle n’évoque ni l’agitation des rues, ni les disputes des êtres. On dirait plutôt une ville de maisons désertes, groupées là au hasard.

Et cependant Marc n’avait pas jugé prudent d’élire sa demeure de ce côté de l’île. Il redoutait qu’aux heures de solitude trop absolue la ville s’animât et lui remémorât les haines des hommes, la lutte de vivre, le souci des lendemains, tout le grouillement des intérêts et des appétits. Il habitait l’autre versant. Il y retourna, flâneur. Les ruelles sont étroites et rapides. Des voûtes les réduisent souvent en souterrains. Une fraîcheur suinte des murs très hauts. Et personne ne s’y rencontre. Quel charme d’être ainsi perdu !

On débouche sur la Méditerranée. Un chemin court au fond du coteau, bordé à gauche d’un talus que couronnent des