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invisible emporta la petite feuille et elle s’enfuit très vite. Hélienne se décida.

Au même moment, la main de Bertrande s’appliquait sur sa bouche.

Il regarda la jeune fille. Elle souriait d’un air suppliant. Il ne l’écouta pas, car il fallait parler, il y avait des raisons mystérieuses pour qu’il parlât. Et même il ouvrit les lèvres afin d’énoncer les syllabes. Mais il ne le put. Il y avait, à n’en pas douter, des raisons beaucoup plus impérieuses pour qu’il ne parlât point, des raisons plus hautes surtout. Et l’aveu fut en lui. Il le répétait indéfiniment, de tout son être, de toute son âme. Et le silence recueillit cet aveu, et Bertrande en fut enveloppée.

Elle ne souriait plus, grave et pensive maintenant. Il devina que de la lumière éclairait son esprit. Comme lui, elle n’avait pas eu conscience d’elle-même, depuis le soir de la Bernerie. Et bien des choses s’expliquaient. Mais dans quel sens ?

Hélienne attendait, anxieux. Serait-ce sa condamnation ou son triomphe ? Qu’allait-elle lui offrir ? De l’amour, de l’affection, de la pitié ? Il regrettait presque ses paroles muettes. À ne rien avouer auparavant, ils se taisaient, s’imaginait-il, de si délicieux aveux !

Elle serra sa main. Marc trembla. Il savait.

Ils se contemplèrent, orgueilleux l’un de l’autre. Mais tandis que Bertrande