Page:Leblanc - L'œuvre de mort, paru dans le Supplément du 23 mars au 24 juin 1897.pdf/153

Cette page a été validée par deux contributeurs.

contredisaient sa nature, son éducation, sa pensée elle-même.

Il sourit.

— Pense-t-elle ? appelle-t-on pensée le fonctionnement d’organe qui régit tant d’individus ?

Il lui pardonna. Le mensonge initial ne résidait pas en elle, mais en lui. À la recherche d’un être qui jouât le rôle de garde du corps, il avait arrêté le premier venu, l’avait habillé de vêtements agréables, paré de rubans et de plumes, orné d’idées nobles, afin de s’enorgueillir à juste titre de l’associé que le hasard lui décernait.

— Expliquer ma conduite, songea-t-il, ne me procure aucun renseignement à propos de Louise. Je la sais façonnée de morale courante. Mais a-t-elle un but ? Vivre lui apparaît-il avec un sens plutôt qu’avec un autre ? M’aime-t-elle ? Quelle est son appréciation sur moi ? Ces questions doivent être résolues si je veux éviter tout acte malencontreux.

Il n’est aisé de voir que la surface des âmes, leurs petits remous, les reflets qu’elles empruntent à ce qui s’y mire. Si quelque tempête ne creuse, dans la masse stagnante, un gouffre où le fond se révèle, c’est par les sillons légers qu’entr’ouvre le vent de tous les jours que l’on devine un peu des choses cachées, fleurs ou vase. Marc s’avisa bientôt qu’à moins de lueurs fortuites, la vérité se compose de découvertes espacées et minces. Il patienta.

Mais il est une autre vérité plus vague et plus importante que l’on obtient sans investigation. L’instinct la proclame. Il crie si les deux âmes sont de même race et de même essence. Et Marc sentit qu’il n’y avait rien de commun entre cette femme et lui. Jusqu’à